du 15/03/2017 au 05/04/2017
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15 mars, jour 266 : Frontière argentine – Villa O’Higgins – 19 km
En passant le col, nous entrons en territoire chilien bien que le poste frontière soit plus loin. Le soleil et la fin de sentier permet de faire sécher le matériel pendant le déjeuner. Du côté chilien, c’est une route caillouteuse mais praticable en selle. La région fait l’objet de conflits frontaliers, les militaires argentins sont même allés jusqu’à exécuter des policiers chiliens ici-même dans les années 60, avant que le Lago del Desierto soit donné à l’Argentine. Les deux pays assurent une présence sur cette frontière isolée pour ne pas laisser l’autre revendiquer de nouvelles terres sous prétexte qu’elles sont laissées à l’abandon. Les tensions expliquent peut-être pourquoi l’Argentine n’a pas construit de route jusqu’au col. Nous remontons avec plaisir sur les vélos pour descendre vers le Lago O’Higgins, nommé Lago San Martin en Argentine. Bernardo O’Higgins, fils d’un immigré irlandais, fut le premier chef d’État du Chili indépendant. Il a donné son nom au lac et à un grand parc national à l’ouest du Fitz Roy, difficilement accessible. Le lac a un couleur d’un bleu ciel irréel, je pense que le glacier O’Higgins qui descend jusqu’à un des bras du lac joue un rôle dans cette couleur. Le contour est très irrégulier avec 8 bras, son altitude est de 255m mais sa profondeur maximale a été mesurée à 836m ! Il est situé à une latitude comparable à celle de Paris (~ 48.5°).
La descente du col jusqu’au lac est magnifique, plutôt technique à cause de la forte pente et du terrain caillouteux. Les freins sont soumis à rude épreuve, j’ai bien fait de les remplacer avant d’entamer la descente. Il ne faut pas avoir le vertige, certains passages de la route se font au bord de falaises, sans aucune barrière de sécurité évidemment. Au bout de la descente, le poste frontière chilien pour se mettre en règle. Ne pas faire comme un cycliste californien qui avait dû refaire le chemin en sens inverse parce qu’il avait oublié de faire tamponner son passeport côté argentin… Un bateau nous attend ensuite pour traverser le Lago O’Higgins. Les 3 heures de traversée nous ont été facturées 65 dollars US, ça reste cher mais on peut se consoler en se disant qu’il est moins cher à la minute que son confrère du côté argentin… Ce bateau ne fait la traversée que deux fois par semaine et s’arrête en fin de saison (fin avril). Jolie traversée mais très venteuse. Il parait que le bateau doit parfois repousser la navigation au lendemain à cause de la houle… En mettant pied à terre, nous arrivons enfin à destination. Il aura fallu deux jours depuis El Chaltén pour passer la frontière et rejoindre l’emblématique Route 7 du Chili : la Carretera Austral.
16 mars au 5 avril (jours 267 à 287) : Villa O’Higgins – Puerto Montt – 1300 km
J’avais rédigé de jolis textes mais mon téléphone a été volé plus tard, avant que je ne puisse les mettre en ligne… La Carretera Austral traverse les régions isolées d’Aysén et des Lacs, entre les Andes et l’océan Pacifique. Sa construction a été lancée en 1976 sous la dictature d’Augusto Pinochet pour désenclaver ces régions, accessibles seulement par la mer ou par l’Argentine rivale. La route n’est enrobée que sur un peu plus du tiers du parcours, autour de la capitale régionale Coyhaique et sur la partie nord. Le sud est particulièrement isolé avec des portions de 200 kilomètres sans aucun village. J’ai par exemple dû rouler 550 km avant de trouver un bureau de poste pour envoyer des cartes postales et 240 km pour trouver une pharmacie et trouver de quoi panser une plaie au pied. C’est un autre monde. La route est interrompue par les bras de mer et le relief, ce qui oblige à effectuer quatre traversées en ferry.