du 19/02/2017 au 21/02/2017
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19 février, jour 242 : Johor – Singapour (39 km)
Singapour est une île à la pointe sud de la péninsule malaise, elle est séparée du continent par le détroit de Johor large de seulement 1 kilomètre. L’accès se fait donc très facilement par un pont. Une fois le pont traversé, c’est le contrôle frontalier pour entrer dans la ville-état. Et ça coince… D’abord parce qu’il faut faire la queue et que chaque véhicule est fouillé. Et lorsque vient mon tour, ma tête (et ma barbe) ne leur revient pas. Je suis gentiment escorté jusqu’à une salle pour subir un interrogatoire : qu’est-ce que tu viens faire, c’est quoi ton travail, t’as combien d’argent, tu vas où après, est-ce que tu connais quelqu’un à Singapour, pourquoi t’es allé en Turquie, est-ce que tu y as rencontré des gens, c’est quoi ta religion, tu vas dormir où, c’est quoi ton profil facebook, est-ce que tes parents savent que tu es là. J’ai d’ailleurs invité le monsieur à passer sur ce blog (donc si vous me lisez, coucou !). Après un relevé d’empreintes et une heure d’attente, je peux enfin entrer à Singapour.
Ce qui est frappant est la verdure de la ville. Le centre de l’île est une forêt équatoriale préservée de l’urbanisation. Des lacs servent de réservoirs d’eau douce et rendent la ville moins dépendante de l’extérieur pour son approvisionnement. Pour donner une idée, l’ile est plus petite que Paris et les départements limitrophes (600km² contre 1000km²). On trouve partout des arbres, de grandes pelouses et des parcs. Je pensais arriver dans une ville moderne gigantesque mais, sauf le quartier central au sud de l’île, ça ressemble plus à la grande banlieue de Paris et aux villes nouvelles.
Il y a un réseau de voies rapides similaires à des autoroutes urbaines à travers l’île, j’y ai roulé un peu en arrivant sans trop savoir si j’avais le droit. J’en suis vite sorti parce que dans un pays où mâcher un chewing-gum est un délit, rouler en vélo sur une voie rapide est peut-être passible d’une amputation des deux jambes ! J’emprunte donc les larges avenues à batailler avec les bus puisque la voie la plus à gauche (quand on roule à gauche) est une voie de bus. J’ai aussi la joie de pouvoir patienter pendant une éternité si j’ai le malheur de tomber sur un feu rouge. C’est génial quand la synchronisation des feux permet de foncer sur plusieurs kilomètres vent dans le dos sans s’arrêter mais dans le cas inverse c’est juste insupportable.
Je profite de Singapour pour acheter un peu d’équipement – ayant le même jour en Malaisie oublié un premier short mis à sécher et déchiré les coutures du second, je n’avais plus que mon caleçon de bain au style psychédélique à porter depuis quelques jours. Je pars aussi à la recherche de pneus pour prendre le relais de ceux qui ont vu 17500km et qui crèvent une fois par semaine depuis quelques temps. Je souhaite reprendre les mêmes Schwalbe Marathon Mondial (polyvalent et durable, idéal pour un voyage) qui ont montré leur efficacité avec aucune crevaison à déplorer pendant les 9000 premiers kilomètres. Après avoir traversé la ville dans tous les sens et constaté que 1) le vélo est un sport de luxe, 2) les Singapouriens font que du vélo de route ou du VTT ; je me contente des seuls pneus valables trouvés, des Schwalbe Marathon GT 365, plus sculptés pour rouler même sur de la neige mais du coup un peu moins efficaces sur asphalte. Ça me sera très utile sur les pistes en Patagonie, moins ailleurs mais c’est déjà un miracle d’avoir trouvé des pneus de qualité.
Ayant le droit à deux bagages de 23kg pour le trajet, cette fois-ci je fais un carton vélo et matériel de couchage et un carton avec le reste. Je ne sais pas comment je me débrouille mais je finis avec des poids respectifs de 28kg et 16kg alors que lors du vol précédent j’avais un seul carton de 30 kg (et il est vrai beaucoup sur les bras). Ça passe sans problème à l’enregistrement puisque le vélo est de toute façon facturé 60€ par vol quelque soit son poids. La compagnie Turkish Airline a une politique lisible sur les équipements de sport et ça fait plaisir. L’alternative sur ce trajet était British Airways qui me semblait aussi réglo sur cette question.
J’embarque le 21 février au soir pour Istanbul, je dors pendant une bonne partie du vol. Je me réveille pour voir le passage au dessus de Téhéran de nuit puis au dessus du Bosphore peu avant le lever du soleil. Le vol suivant va vers Buenos Aires avec une escale à Sao Paulo. Le passage au dessus de la Grèce et de ses montagnes enneigées au petit matin est de toute beauté. Un peu ému aussi de reconnaître un lac que j’avais longé il y a tout juste 6 mois… Ça défile très vite, bientôt le sud de l’Italie est en vue puis l’Espagne et enfin l’océan pour plusieurs heures. Le Brésil enfin, d’abord la savane puis la forêt humide avant que le soleil ne se couche à Sao Paulo puis que l’avion que je n’ai pas quitté s’élance pour une dernière traite jusqu’à la capitale argentine.