du 20/07/2016 au 30/07/2016
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Cette page concerne également la Slovénie et la Bosnie-Herzégovine sur quelques kilomètres.
20 juillet, jour 28 : Aquilinia – Vela Ucka (67 km)
Je traverse la frontière italo-slovène très vite et sans aucun contrôle. Si l’Italie était très urbanisée autour de Trieste, la Slovénie est très rurale et je ne passe que par des hameaux ou des villages de quelques dizaines de maisons. C’est très vallonné, en fait c’est comme si l’Italie avait pris la partie à peu près plate et urbanisée de la région et avait laissé des montagnes vides à la Slovénie. En peut-être deux heures dans ce pays, j’aurai réussi à parler en anglais avec les slovènes autant qu’en 10 jours avec les italiens ?
Après une vingtaine de kilomètres, je suis déjà à l’entrée de la Croatie. De l’autre côté du poste de police frontalière, j’aperçois un couple de cyclistes et je leur fais signe pensant que ce sont les Suisses rencontrés la veille. Erreur, c’est un couple de Polonais, Anna et Leszek, qui fait le trajet Marseille – Grèce. Je constate rapidement qu’ils sont bien plus rapides que moi et après avoir essayé de les suivre pendant une demi-heure, je les laisse me semer. Je compense en roulant plus longtemps !
Le reste de la journée va consister à gravir un col à 950m d’altitude et très raide à certains endroits, plus de 9%. Je ne peux pas avancer sans être en danseuse à la vitesse spectaculaire de 4 km/h, ça m’oblige à poser pied à terre pour pousser à la vitesse encore plus misérable de 2.5 km/h mais au moins je tiens plus de quelques mètres sans être épuisé. Cette route me permet de tirer tout droit en évitant un long détour dans la péninsule au nord-ouest du pays.
Je m’arrête un peu avant le sommet pour profiter d’une prairie accueillante et y passer la nuit.
21 juillet, jour 29 : Vela Ucka – Klenovica (92 km)
Je reprends la fin de la montée avant d’entamer la longue descente jusqu’à la mer ?. Mais à peine ai-je passé la ville de Rijeka que la route se remet à monter sec. En fait, comme la veille, il y a bien une route qui passe dans la vallée, ou qui évite soigneusement de monter inutilement mais c’est une voie rapide interdite aux vélos. Je suis donc forcé de prendre l’ancienne route qui passe par les villages accrochés sur les collines. Je commence à aimer ce pays.
Lorsque je reviens au bord de la mer, j’arrive enfin sur un terrain plat où je peux pédaler tranquillement en admirant le paysage. Par surprise, je suis rattrapé par Anna et Leszek qui avaient pris de l’avance hier mais ils ont fait la grasse matinée. J’essaie de m’accrocher à leur rythme tant bien que mal mais je les laisse finalement s’échapper pour descendre en bord de mer faire une pause. La seule route qui longe toute la côte du nord au sud du pays est souvent en hauteur, pour rejoindre les stations balnéaires il faut donc descendre puis remonter à la force des mollets les 50-100m de dénivelé.
Dans cette partie de la Croatie, la mer n’est pas une immense étendue d’eau. L’horizon est barré par des îles à quelques kilomètres du continent, on voit même parfois 2 ou 3 îles se succéder. Les premières seraient aisément accessible en kayak. Le contraste est très fort entre le continent, recouvert de maquis et fait de rochers gris clair, et les îles, faits de roche jaune et complètement nue de toute végétation. D’un côté on se croirait en Corse et de l’autre on se croirait sur la planète Mars, les deux étant séparés d’une poignée de kilomètres d’eau.
Le soir venu, je galère pour trouver un emplacement pour planter ma tente : une petite pelouse caillouteuse et penchée sur le côté du bureau de poste. Le sommeil est difficile à cause de la pente et de la chaleur…
22 juillet, jour 30 : Klenovica – Susanj (95 km)
Je continue la route le long de la côte. La route grimpe à 300m d’altitude et s’éloigne un peu de la côte. Je ne l’anticipe pas tout à fait mais une bonne partie de la journée sera à l’écart des villes donc le ravitaillement en eau est compliqué. Je n’ai souvent que 1.5L d’eau maximum sur moi sauf en fin d’après-midi où je charge au moins 3L pour cuisiner et passer la nuit.
La route est souvent bordée par des blocs de pierre d’environ 40cm qui sont (j’imagine) censés empêcher une voiture de tomber dans le précipice. Je me fais la réflexion que si je devais taper dans un de ces blocs, par exemple une de mes sacoches lorsque je frôle le côté droit de la route, j’aurais bien des chances de passer par dessus le bloc de pierre et de finir en bas en très sale état.
Je prends la décision de quitter la côte dès que possible pour rejoindre l’intérieur du pays. Le bord de mer est exclusivement touristique, les villes ne sont que des groupes de maisons de location entourées de campings, les trois-quarts des véhicules sont étrangers, parfois il y a même des 4×4 qui tractent leur bateau. C’est trop artificiel et ça sera plus facile de trouver un lieu où planter la tente dans les terres.
Tranquillement installé à l’ombre d’un arrêt de bus, en train de travailler sur ce fameux blog, je suis encore une fois rattrapé par le couple polonais, décidément ! Je les rejoins et cette fois je tiens jusqu’au bout (c’est plus facile en descente, mon vélo est plus lourd :p). Je les laisse devant leur camping et prend la route des montagnes pour rejoindre l’intérieur du pays.
Le col à passer est de 950m en partant du niveau de la mer. Heureusement la pente est assez douce pour que je puisse rester sur le vélo et en prenant mon temps, ça passe plus facilement que l’avant-veille. Je m’arrête aux deux-tiers de l’ascension dans un pré où un berger fait brouter ses chèvres. La nuit sera agréable sur une herbe molle, un terrain plat, au frais et en silence.
23 juillet, jour 31 : Susanj – Gracac (98 km)
Je terminé l’ascension tranquillement avant. La végétation change rapidement après le sommet, on se croirait passer de la Corse au piémont alpin en quelques minutes.
Au bout de la descente, je passe par hasard devant le village natal de Nikola Tesla où un musée à été construit mais à 10€ l’entrée je passe mon chemin. Nikola Tesla un inventeur serbe, né dans l’actuelle Croatie et de nationalité autrichienne de fait. Il a énormément contribué à la seconde révolution industrielle à la fin du 19ème siècle en inventant l’alternateur pour produire du courant et le réseau électrique alternatif pour transporter efficacement le courant sur de longues distances, deux technologies encore utilisées massivement aujourd’hui pour vous permettre de me lire 🙂
24 juillet, jour 32 : Gracac – Oklaj (91 km)
J’entame la journée par une visite d’une grotte fréquentée depuis des dizaines de milliers d’années par les hommes, les ours et les lions dont on a retrouvé des os. La grotte ouverte au public est longue de 600m et bien éclairée, ce n’est pas comme ailleurs où le guide pointe vite fait les endroits à regarder avec sa lampe blanche, sans qu’on puisse admirer les reliefs et les couleurs. Ça m’occupe une grande partie de la matinée. Je rencontre à cette occasion Jan qui a récemment parcouru le Vietnam à vélo en 4 semaines, un témoignage intéressant en vue de mon passage dans ce pays dans quelques mois.
Je me retrouve un peu en galère autour de midi parce qu’il n’y a pas de ville sur la route donc pas de possibilité d’acheter à manger alors que nous sommes un dimanche, je manque aussi un peu d’eau. J’improvise en grignotant du pain sur la route.
J’arrive à l’entrée du parc national de Krka, c’est un canyon de plusieurs dizaines de kilomètres avec des cascades en plusieurs endroits. Malheureusement les lieux intéressants me forceraient à faire un long détour et à rejoindre la côte, ce que je ne souhaite pas. Je prends une petite route sur le plateau surplombant le début du canyon pour essayer de m’en approcher. J’y arriverai au prix de plusieurs kilomètres sur des chemins de caillasse où je préfère parfois pousser le vélo que de risquer une chute ou une casse mécanique.
Je termine ma journée dans la petite ville de Oklaj, je dîne devant un terrain de jeu où des enfants et des ados jouent. Certains s’arrêtent et m’observent comme si j’étais un animal dans un zoo (mais qu’est ce qu’il fait ? il mange des pâtes ???). J’essaie d’échanger quelques mots mais ils sont timides. Quelques uns me suivent jusqu’à l’emplacement où j’installe ma tente pour la nuit, devant leur école. Ils s’empressent de répandre la nouvelle et je me retrouve avec jusqu’à une dizaine de jeunes curieux qui me regardent à côté de ma tente. Finalement on brise la glace et j’arriverai à discuter avec les plus doués en anglais, Ivana, Ante ou Nicole. Pour la petite histoire, un petit qui doit avoir 8 ans s’est évertué pendant toute la soirée à m’interroger en croate sur Cristiano Ronaldo : est-ce que je le connais ? je l’ai déjà vu ? j’ai une photo de lui ???
25 juillet, jour 33 : Oklaj – Sinj (95 km)
Matinée en solitaire puisque j’emprunte des routes quasiment désertes. Une grande montée m’emmène à 850m d’altitude (soit 450m de montée) mais la difficulté réside plutôt dans les successions de montées / descentes, pas forcément importantes individuellement mais ça fatigue.
Au sommet je décide de déjeuner, j’installe mes affaires sur un rocher, je m’apprête à m’asseoir à mon tour et… un petit serpent se glisse rapidement sous le rocher en question. Nope, je remballe en vitesse et m’éloigne de quelques centaines de mètres. Je ne sais pas si c’est une espèce qui mord et je n’ai pas d’essayer la méthode empirique.
En descendant, à court d’eau, je demande à un monsieur assis en terrasse de me remplir une bouteille. Il me propose gentiment un verre de vin blanc avec des glaçons : c’est rafraîchissant. La suite de la descente est peut-être un peu plus rapide que d’habitude?
Arrivé en bas, je profite d’une plage au bord d’un lac pour me baigner, me laver et me ravitailler en eau, merci le filtre céramique.
26 juillet, jour 34 : Sinj – Rascane (88 km)
Je ne sais pas pourquoi mais j’ai du mal à fournir l’effort. Ou plutôt si, la pizza mangée la veille au soir n’est pas aussi efficace qu’un gros plat de pâtes !
Je passe au dessus d’une belle vallée encaissée puis au pied d’un des plus hauts sommets de Croatie (Sveti Jure). Avec 1700m il fait pâle figure par rapport à d’autres montagnes mais il est littéralement au bord de la mer. Je suis malheureusement sur le mauvais versant pour admirer la montagne qui plonge vers la mer.
En fin d’après midi, des orages éclatent derrière moi, j’ai parfois la chance de voir la foudre en me retournant. J’aurais été complètement trempé si j’étais passé 15min plus tard mais heureusement je reste au sec. Et un peu plus loin, la route est humide, j’ai donc aussi évité les orages qui se sont déclarés devant moi ?. Je passe la nuit au pied d’une église, comme un pied de nez à l’actualité du jour en France.
27 juillet, jour 35 : Rascane – Svitava (Bosnie)
La journée commence avec un pneu avant à plat. Une rustine de la chambre à air s’est légèrement décollée et laisse fuiter de l’air. Je change la rustine mais peine perdue, elle colle mal et lâchera après 50 km. Je changerai la chambre à air dans l’après-midi.
Je fais un petit détour pour visiter le musée consacré à la ville antique de Narona. Ce musée est original parce qu’il a été construit par dessus un site archéologique, le temple dédié au premier empereur romain, Auguste. D’où les poutres métalliques qui enjambent des pierres vieilles de 2000 ans.
La ville avait un rôle assez important, que ce soit sous la domination grecque ou romaine. Elle est en effet à proximité d’une grande rivière qui permettait de transporter les marchandises de la mer loin dans les terres de Dalmatie (région des actuelles Croatie et de Bosnie). C’était une position très stratégique vu le relief accidenté de la côte.
Je passe en Bosnie-Herzégovine dans l’après-midi. Très vite je m’aperçois de la différence de richesse entre les deux pays, à la vue de l’état des voitures, des bords de routes sans aménagement ou du nombre de petits agriculteurs. Je passe d’ailleurs la nuit dans une petite plantation de figuiers mais les fruits sont encore loin d’être mûrs.
28 juillet, jour 36 : Svitava (Bosnie) – Trsteno (Croatie)
Je traverse des zones parfois très vides des montagnes bosniaques. Les vallées en contrebas sont larges et plates (mais il n’y a pas de route ?), les rares villages déserts. Au bord d’une route, je retrouve un automobiliste qui venait de me dépasser arrêté, je comprends tant bien que mal qu’il a besoin d’eau pour le radiateur, je lui donne le fond qui me restait. Pas d’inquiétude, un lac plus loin me permet de me ravitailler.
Je continue à avancer dans ce désert humain, je me dirige vers la frontière en suivant une route où je ne verrai pas une seule voiture en une heure. Ah le silence… Au poste frontière, personne. Un policier finit par sortir d’une cabane l’air ronchon (j’ai du interrompre sa sieste) et me dit de rebrousser chemin. C’est un poste frontière pour les locaux ! Comme je n’ai pas vraiment envie de perdre une journée à cause de ce léger détail de m*rde, je le supplie, lui dit que j’ai mis une journée entière pour arriver là, lui signale que je suis français et qu’il n’a pas à tamponner quoi que soit. Il finit par retourner dans sa cabane et me faire un signe du genre « du balai » avant de fermer la porte. Bon bah… Je passe, adios amigo.
Je reviens sur la côte croate et je retrouve la circulation routière. Vue la difficulté que j’avais eu précédemment pour trouver un endroit où poser ma tente, je m’arrête dans un camping pour une fois.
29 juillet, jour 37 : Trsteno – Gruda (59 km)
Une journée marquée par la cité médiévale de Dubrovnik. Les fortifications autour de la vieille ville très bien préservée – et reconstruite après la guerre des années 1990 – en font un très important site touristique. La ville sert par exemple de lieu de tournage pour la série télé Game of Thrones pour les scènes de déroulant à King’s Landing.
Un bel endroit donc, qui a gardé ses maisons médiévale aux tuiles oranges, ses palais et ses églises. L’enceinte de la vieille ville est entièrement piétonne. De toute façon avec toutes les ruelles étroites et les escaliers, on ne peut circuler qu’à pied, même les livraisons de commerce se font avec les chariots et les muscles des livreurs. Ça limite d’ailleurs mes possibilités de visite puisque je suis réticent à laisser mon vélo chargé trop longtemps sans surveillance.
Je reprends ma route vers le sud-est sous un soleil de plomb. Je m’arrête finalement à quelques kilomètres de la frontière monténégrine pour profiter une dernière fois de l’Internet mobile et faire une mise à jour de ce blog !